Les arrêts de la Chambre criminelle de la Cour de cassation sur le recours abusif de CDD d’usage sont rares.
Dans un arrêt du 6 mai 2008 (06-82.366), la Chambre criminelle de la Cour de cassation, reprend la jurisprudence dégagée par la chambre sociale dans deux arrêts de revirement du 23 janvier 2008.
Tout d’abord, il faut rappeler que le recourir abusif au contrat à durée déterminée d’usage est sanctionné pénalement de :
- une amende de 3.750 euros au plus ;
- une amende de 7.500 euros au plus et/ou un emprisonnement de 6 mois au plus en cas de récidive (c. trav. ; L. 152-1-4 ancien et L. 1248-1 nouveau).
Suite à un contrôle de l’inspection du travail, un employeur dans le secteur du déménagement était poursuivi au pénal pour recours abusif au CDD d’usage pour des emplois de déménageurs en CDD successifs.
En l’occurrence, la société avait employé plusieurs salariés en recourant à des CDD successifs : Stéphane Z a été employé entre le 12 mars et le 15 novembre 2002 sous couvert de 8 contrats à durée déterminée, José X a travaillé dans les mêmes conditions entre le 2 janvier et le 31 octobre 2002 et que Stéphane X a exécuté 9 contrats à durée déterminée entre le 7 janvier et le 9 septembre 2002.
Le Directeur Général de l’entreprise a été cité devant le Tribunal correctionnel. Il avait été condamné en première instance par le Tribunal Correctionnel mais la Cour d’Appel de Riom a infirmé le jugement et relaxé le Directeur Général en se fondant sur la jurisprudence antérieure aux arrêts de la chambre sociale du 23 janvier 2008 ; les juges d’appel avaient, en l’occurrence, vérifié uniquement les deux éléments posés par la jurisprudence antérieure, à savoir :
- que le CDD d’usage a bien été conclu dans un des secteurs d’activité définis par décret ou par une convention collective ;
- qu’il existe dans ce secteur un usage constant permettant de ne pas recourir au CDI.
Mais la Chambre Criminelle de la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel de Riom et s’aligne sur la jurisprudence de la chambre sociale issue des arrêts du 23 janvier 2008 ; elle décide qu’« en se prononçant ainsi, sans préciser en quoi les emplois concernés présentaient par nature un caractère temporaire, et alors qu’elle avait constaté que les contrats avaient pour objet de pourvoir durablement des emplois liés à l’activité normale et permanente de l’entreprise, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. ».
A l’instar de la chambre sociale, elle pose donc elle aussi une troisième condition à vérifier par le juge pour recourir valablement au CDD d’usage à savoir vérifier le « caractère par nature temporaire de l’emploi concerné ».
L’affaire est renvoyée devant la Cour d’Appel de Lyon.
Cette jurisprudence plus restrictive va, peut-être, faire renaître de leurs cendres les sanctions pénales en matière de CDD d’usage, qui n’étaient plus appliquées du fait de la jurisprudence très libérale de 2003.
L’abus de recours au CDD d’usage est donc sanctionné pénalement.
Il ne faut pas l’oublier ; l’employeur devra recourir au CDI sous peine de sanctions pénales.
Frédéric CHHUM
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