Maître Frédéric
CHHUM est le conseil du CHSCT de Robert Half International.
Un
litige opposait la société Robert Half International à son CHSCT concernant la
fixation de l’ordre du jour de la réunion du CHSCT du 1er septembre
2009.
Celui-ci a été soumis au Tribunal de Grande instance de Paris, qui a rendu une ordonnance de référé du 8 octobre 2009 (n°09/57787).
La
principale opposition concernait une affaire de harcèlement moral d’un de ses
salariés.
L’originalité
de cette espèce résidait en ce que c’était la secrétaire du CHSCT elle-même qui
était victime de ce harcèlement.
Elle
a saisi, en sa qualité de secrétaire de l’Institution Représentative du Personnel,
le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris, afin de trancher
le litige ; elle a formulé les demandes suivantes :
- La
communication de l’intégralité du rapport sur le harcèlement moral de Madame X.
au CHSCT ;
- L’information
et la consultation du CHSCT sur le rapport concernant le harcèlement moral de
Madame X ;
- La
tenue d’une réunion CHSCT sur l’irrégularité et la nullité de la délégation de
pouvoirs du Managing Director pour
présider le CHSCT.
La
société Robert Half International, quant à elle, contestait la compétence du
Tribunal de grande instance au bénéfice du Conseil de Prud’hommes ; elle
soulevait également le manque d’intérêt à agir de Madame X.
Sur
la compétence du Tribunal de Grande Instance
Le
Conseil des Prud’hommes est compétent en matière de litiges individuels
relatifs au contrat de travail. Le Tribunal de Grande Instance est, lui,
compétent en matière de litiges collectifs.
En
l’espèce, une particularité se pose : la secrétaire du CHSCT, qui exige la
communication du rapport, est elle-même la salariée harcelée moralement. La
société RHI a joué sur cet élément de fait pour invoquer le défaut d’intérêt à
agir de la défenderesse.
Elle
estimait en effet que c’est en sa qualité de salariée et non pas de secrétaire
du CHSCT que celle-ci avait agi.
Le
TGI de Paris retient pour sa part que Madame X. a agi en sa qualité de
secrétaire du CHSCT et que les demandes présentées entrent bien dans les
attributions du CHSCT. Par conséquent, il se déclare compétent, lesdites
demandes, du fait de leur nature collective, n’entrant pas dans le champ de
compétence matérielle du Conseil de Prud’hommes.
Qui
plus est, faute d’accord entre le Président et le Secrétaire du CHSCT pour la
fixation de l’ordre du jour, il appartient au Juge des référés de résoudre la
difficulté.
Il
ne faisait donc aucun doute que le Juge des référés du Tribunal de grande
instance de Paris était compétent.
Sur
l’information et la consultation du CHSCT sur le harcèlement moral
Madame
X. a demandé à ce que « le harcèlement moral de la salariée et membre du
CHSCT Madame Carole X. » soit inscrit à l’ordre du jour.
Le
tribunal relève que la consultation demandée n’entre pas dans le champ des
consultations obligatoires du CHSCT (article L. 4612-8 et suivants). Il
n’ordonne donc qu’une information de l’instance.
Néanmoins,
rappelons-le, aux termes de l’article L.4612-1, le CHSCT a pour mission de
contribuer à la protection de la santé physique et mentale ainsi que la
sécurité des travailleurs de l’établissement.
Le
juge a donc décidé, au regard de la mission du CHSCT, que devaient être communiquées
les informations sur le contenu du rapport sur le harcèlement moral de Madame
X., quand bien même la requérante, unique membre du CHSCT, s’avère être
personnellement et directement concernée.
Sur
la contestation de la délégation de pouvoirs
En
l’espèce, la requérante avait sollicité l’inscription à l’ordre du jour d’une
« délibération du CHSCT pour mandater un avocat afin qu’il diligente au
nom du CHSCT une procédure pour faire constater l’irrégularité et la nullité de
la délégation de pouvoirs de Monsieur Y., Managing
Director, pour présider le CHSCT (…) ».
Le
juge estime qu’une telle précision n’est pas nécessaire.
Ainsi,
dès lors qu’est examinée, par le CHSCT, la validité de la délégation de
pouvoirs, celui-ci peut voter toute délibération mandatant un avocat afin de
contester en justice, et ce parce que cette délibération se rattache par un
lien implicite à la délégation de pouvoirs.
Téléchargement Ordonnance de référé du 8.10.2009
Frédéric
CHHUM, avocat à la Cour
Marie
LESIEUR, juriste en Droit Social