1. Rappel des spécificités du CDD d’usage
Le CDD
d’usage présente trois particularités :
• Il n’est
soumis à aucune durée maximale ;
• Il n’y a
aucun délai de carence à respecter entre deux CDD d’usage. Il est donc tout à
fait possible de conclure plusieurs CDD d’usage successifs ;
• Aucune
indemnité de fin de contrat n’est due au terme du CDD d’usage.
Ce contrat
de travail à durée déterminée doit être écrit. A défaut, il sera présumé conclu
pour une durée indéterminée.
Il doit
comporter un certain nombre de mentions obligatoires (article L.1242-12 du Code
du travail) :
• Le nom et
la qualification professionnelle de la personne remplacée ;
• La date du
terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement lorsqu’il comporte un
terme précis ;
• La
désignation du poste de travail ;
• L’intitulé
de la convention collective applicable ;
• La durée
de la période d’essai éventuellement prévue ;
• Le montant
de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris les primes et
accessoires de salaire s’il en existe ;
• Le nom et
l’adresse de la caisse de retraite complémentaire ainsi que, le cas échéant,
ceux de l’organisme de prévoyance.
Si une de ces conditions venaient à manquer, le contrat serait, là encore, présumé conclu pour une durée indéterminée.
2. Les trois conditions de recours au CDD d’usage
Conformément
aux articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1244-1 et D. 1242-1 du Code du travail,
dans les secteurs d’activités définis par décret ou par voie de convention ou
d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être
pourvus par des CDD lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un CDI
en raison de la nature de l’activité exercée (condition n°1) et du caractère par nature temporaire de ces emplois
(condition n°2).
Enfin, le recours à l’utilisation de CDD successifs doit être justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi (condition n°3).
3. Sur l’interprétation par la Cour de cassation du caractère par nature temporaire de l’emploi (Cass. soc. 5 mai 2010, n°08-43.078)
La
jurisprudence était attendue sur ce point.
En l’espèce,
une danseuse avait été employée par une société gérant une base de loisirs dans
le cadre de 15 contrats à durée déterminée exécutés entre mai 2003 et avril 2006.
Celle-ci a,
au terme de la relation contractuelle, demandé la requalification de ses
contrats – avec les conséquences de droit afférent – en une relation à durée
indéterminée.
Dans un arrêt du 19 mai
2008, la Cour d’appel de Grenoble avait fait droit à sa demande aux motifs que « la salariée, engagée sur quatre spectacles consécutifs, l’avait été pendant
une trentaine de mois sur la même scène, que les représentations avaient lieu
selon une périodicité régulière avec le même metteur en scène et le même directeur
artistique, que la présence des danseurs était indispensable pour le
fonctionnement du music hall sans qu’il soit justifié d’en changer, et que la
clientèle était reçue toute l’année sauf l’été », réfutant ainsi le caractère par nature
temporaire de l’emploi.
L’employeur a régularisé un
pourvoi en cassation.
Il invoquait d’une part que
« l’organisation, par une entreprise
de music hall, d’un spectacle différent chaque saison, impliquant un renouvellement
des rôles, et par conséquent des artistes à qui ils sont attribués, ainsi que
la durée aléatoire de ces spectacles en fonction du succès rencontré auprès du
public » justifie le recours au contrat à durée déterminée ;
d’autre part, pour chaque contrat, la salariée « avait été engagée en qualité de danseuse […] pour participer à un
spectacle déterminé, pendant toute sa durée, ou un nombre de représentations
déterminé, et bénéficiait du statut d’intermittent du spectacle ».
La Cour de cassation a confirmé
l’analyse de la Cour d’appel.
En effet, la Haute
juridiction justifie sa position en précisant que bien que
l’hôtellerie-restauration et le spectacle relèvent de secteurs d’activités où le
recours à des contrats à durée déterminée est d’usage constant, l’intéressée « avait occupé le même emploi de danseuse pendant
une trentaine de mois, avec une interruption, comprise entre un mois et demi et
environ deux mois, au cours de l’été » ; par conséquent cet
emploi n’était pas, selon la Cour, lié à un spectacle déterminé, mais à
l’activité normale de l’entreprise et avait un caractère permanent.
De toute évidence, la Cour
de cassation fait ici une analyse restrictive du caractère nécessairement
temporaire de l’emploi permettant de recourir aux CDD d’usage.
En conclusion, ce type de
contrat doit être utilisé avec précaution, à défaut les employeurs s’exposent à
le voir requalifier en CDI.
Cependant il faut noter que
cet arrêt n’étant pas publié au bulletin, il semble que la Cour n’ai voulu lui
conférer qu’une portée relative.
Frédéric CHHUM - Avocat
Camille COLOMBO - Juriste en droit social
www.chhum-avocats.com
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