Lorsqu’un salarié est licencié, trois questions se posent à lui :
- Ma lettre de licenciement est-elle contestable ?
- Quel Conseil de Prud’hommes dois-je saisir ?
- Quelles sommes puis-je demander et obtenir en cas de licenciement abusif ?
1) Quelles mentions doivent obligatoirement figurer dans la lettre de licenciement ?
Le licenciement (personnel ou économique) doit reposer sur une cause réelle et sérieuse (art. L. 1232-1 et L1233-2 du Code du travail).
La lettre de licenciement est l’élément clé de la procédure de licenciement, en ce sens qu’elle fixe les limites du litige (Cass. soc. 2 mars 1999 ; Cass. soc. 27 février 2008). Les juges du fond ne peuvent pas examiner d'éventuels motifs qui peuvent justifier le licenciement mais qui ne figurent pas dans la lettre de licenciement.
En revanche, le salarié pourra contester que les motifs allégués soient effectivement ceux du licenciement.
De plus, l'article L. 1232-6 du Code du travail dispose que la lettre de licenciement doit « comporte[r] l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur », c’est-à-dire que les motifs invoqués par l'employeur doivent s'inscrire dans le cadre des motifs constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Si l'employeur n'énonce dans la lettre de licenciement aucun motif précis, ceci équivaut à une absence de motif (Cass. soc. 20 novembre 1990) ; le licenciement serait alors sans cause réelle et sérieuse.
En outre, l'indication des motifs ne peut pas être faite par référence : ainsi, la mention dans la lettre de licenciement de « fautes professionnelles exposées dans de précédents courriers » ne constitue pas l'énoncé des motifs exigé par la loi (Cass. soc. 8 janvier 1997). Il en est de même d'une référence aux motifs indiqués dans la lettre de convocation à un entretien préalable (Cass. Ass. Plén. 27 novembre 1998).
De surcroît, le motif énoncé dans la lettre de licenciement doit être « suffisamment précis pour être vérifiable » (Cass.soc. 25 avril 2001).
Ainsi, les motifs suivants ont été jugés trop vagues :
- « Refus de la modification du contrat » (Cass. soc. 2 avril 1997) ;
- « Nécessité de restructuration » (Cass. soc. 28 mars 2000) ;
- « Inaptitude au poste occupé » (Cass. soc. 20 février 2002).
En revanche ont été considérés comme suffisamment motivés les motifs suivants :
- « Suppression d'emploi consécutive à une restructuration de l'entreprise » (Cass. soc. 2 mars 1999) ;
- « Comportement contraire aux bonnes mœurs » (Cass. soc. 25 avril 2001).
Enfin, le salarié doit vérifier la date d’envoi de la lettre de licenciement : en effet, l’article L. 1232-6 du Code du travail dispose que la lettre de licenciement ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué.
2) Quel Conseil de prud’hommes saisir ?
En principe, le salarié doit saisir le tribunal du « domicile du défendeur », soit, plus simplement, le Conseil de prud’hommes du siège social de son employeur.
La règle de compétence territoriale du Conseil de prud’hommes, prévue à l’article R. 1412-1 du Code du travail, est la suivante :
- Lorsque le salarié travaille dans un établissement, le Conseil de prud’hommes compétent est celui dans le ressort duquel se situe l’établissement ;
- Lorsque le salarié travaille en dehors de tout établissement, c’est le Conseil de prud’hommes de son domicile qui est compétent.
Dans tous les cas, le salarié bénéficie d’un droit d’option :
- Il peut saisir le CPH du lieu où l’engagement a été contracté ou,
- Il peut saisir le CPH du lieu où l’employeur est établi.
Si le contrat de travail prévoit une clause dérogeant à ces règles, elle est réputée non écrite.
3) Quelles sommes un salarié peut obtenir-il en cas de licenciement abusif ?
La loi opère une distinction entre les salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus, et les salariés ayant moins de 2 ans d’ancienneté ou ayant travaillé dans une entreprise de moins de 11 salariés.
3.1) Les salariés ayant 2 ans d’ancienneté au moins dans une entreprise de 11 salariés et plus :
Concernant ces salariés, l’article L. 1235-3 du Code du travail énonce que le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec le maintien de ses avantages acquis (bien que dans la pratique, cela n’arrive jamais).
En cas de licenciement abusif, le salarié percevra une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois précédant la rupture du contrat de travail.
Cette indemnité doit prendre en compte la rémunération quelle soit fixe ou variable (Cass.soc. 10 avril 1991 n° 87-41.433) mais également les heures supplémentaires que le salarié a effectué durant les six derniers mois (Cass.soc. 21 septembre 2005 n° 03-43.585).
Les six mois de salaire ne constituent qu’un minimum que le juge du fond peut augmenter en fonction de son appréciation souveraine des faits et surtout du préjudice dont le salarié se prévaut en raison de son licenciement sans cause réelle et sérieuse.
A cet égard, les critères qui permettent au salarié d’obtenir plus de six mois de salaire sont :
- Son âge ;
- Son ancienneté ;
- Sa charge de famille ;
- Le fait d’avoir ou non retrouvé un emploi ;
- Son état de santé ;
- Son préjudice moral (circonstances vexatoires de la rupture) ;
- etc.
3.2) Les autres salariés : moins de deux ans d’ancienneté et/ ou employés dans une entreprise employant moins de 11 salariés
Les dispositions précitées ne sont pas applicables aux salariés ayant moins de deux ans d’ancienneté mais également aux salariés dont l’entreprise comporte un effectif inférieur à 11 salariés, conformément à l’article L. 1235-5 du Code du travail.
Dans cette hypothèse, l’indemnité sollicitée par le salarié relèvera de l’appréciation souveraine des juges du fond et sera fonction du préjudice qu’il aura nécessairement subi du fait de son licenciement.
En pratique, en cas de licenciement abusif, le montant des dommages-intérêts est équivalent à trois mois de salaire bruts, sauf si le salarié établit un préjudice supplémentaire (âge, charge de famille, chômage de longue durée, etc.).
4) Les autres sommes qu’un salarié peut demander
En toute hypothèse, le salarié peut faire d’autres demandes devant le Conseil de prud’hommes :
- Indemnité de préavis ;
- Congés payés ;
- Diverses primes (13e mois, etc.) ;
- Indemnité conventionnelle/légale de licenciement ;
- Paiement des heures supplémentaires ;
- Dommages-intérêts divers (travail dissimulé, procédure vexatoire, harcèlement moral, etc.).
Frédéric CHHUM
Avocat à la Cour
Camille COLOMBO
Juriste en droit social
Tél : 01 42 89 24 48
Ligne directe : 01 42 56 03 00
e-mail : [email protected]
Site internet : www.chhum-avocats.com