Dans un jugement du 31 janvier 2013 (RG : 10 /08945), le Conseil de prud'hommes de Paris (statuant en départage) a condamné la société Fleurus Presse à payer à l'illustratrice des dommages intérêts pour licenciement abusif (40.000 euros) et vexatoire (5.000 euros) ; le Conseil a aussi accordé à la salariée le bénéfice de la Convention collective des journalistes (avec un rappel d'indemnité conventionnelle et de prime d'ancienneté).
L'illustratrice du magazine « Je lis déjà » destiné aux jeunes enfants avait été employée initialement en qualité d'auteur à compter d'octobre 1998, puis salariée («Emploi : journaliste non permanent, Catégorie : pigiste, CCN des journalistes ») à compter du 1er janvie 2004.
Elle illustrait notamment la bande dessinée « Blabla Mic et Lola ».
La salariée avait été licenciée une première fois par un email du 15 décembre 2009 au motif que « sa publication ne correspondait pas à la ligne éditoriale que la société souhaitait donner à sa nouvelle formule », puis une seconde fois, le 31 mars 2010, pour un motif économique.
1) Illustratrice = journaliste = Convention collective des Journalistes ?
L'illustratrice réclamait la qualité de journaliste professionnelle au sens des articles L. 7111-3 et L. 7111-4 du code du travail. Le Conseil de prud'hommes a rejeté sa demande.
Toutefois, le Conseil relève notamment que « ( ...) la société Fleurus Presse lui a reconnu volontairement la qualité de journaliste professionnelle/pigiste régulière et a accepté de la faire bénéficier des dispositions de la convention collective des Journalistes même si son travail est resté le même (...)».
A cet égard, le Conseil considère qu'elle doit bénéficier de la Convention collective des Journalistes ainsi que les dispositions sur les droits d'auteur et l'accord d'entreprise sur la réexploitation des oeuvres des journalistes de Fleurus Presse.
Il faut préciser que la CCN des journalistes prévoit une prime d'ancienneté dès 5 ans d'ancienneté et que l'indemnité de licenciement est très favorable (1 mois par année d'ancienneté).
2) Licenciement sur licenciement ne vaut ! + licenciement vexatoire !
Le Conseil relève que « Dans un courriel explicite daté du 15 décembre 2009, l'employeur a notifié à la salariée sa décision de mettre fin à la publication de la bande dessinée au motif qu'elle ne correspondait pas à la ligne éditoriale qu'elle souhaitait donner à la nouvelle formule du magazine « Je Lis Déjà ». Et de fait, Fleurus Presse n'a plus fourni de travail à la salariée après la remise de ses derniers dessins en décembre 2009 et a cessé de la rémunérer, son dernier bulletin de salaire datant de novembre 2009.
Dans la mesure où la salariée travaillait régulièrement pour Fleurus Presse, celle-ci était tenue de lui fournir du travail. Or, en s'abstenant de le faire et en mettant fin, par un simple courriel, à la publication de la bande dessinée, elle a licenciée la procédure au mépris de la procédure légale. Il en résulte que son licenciement, qui a été prononcé le 15 décembre 2009, s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et que le second licenciement prononcé le 31 mars 2010, pour motif économique, c'est-à-dire pour un motif différent du premier, est inopérant, le contrat de travail étant rompu».
L'illustratrice obtient une indemnité compensatrice de 2 mois de salaire et 40.000 euros à titre dommages intérêts pour licenciement abusif. Elle obtient aussi un rappel de prime d'ancienneté des journalistes et d'indemnité conventionnelle de licenciement.
Enfin, l'illustratrice obtient aussi 5.000 euros pour licenciement dans des conditions vexatoires.
Frédéric CHHUM Avocat à la Cour
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